Bertrand Cantat: 15 ans après les faits, le Jury n’a toujours pas rendu son verdict
Retour au blogL’affaire Bertrand Cantat, est ressortie ces derniers jours des prétoires et des chroniques judiciaires, pour écraser de sa force et de sa violence le paysage médiatique. La situation est gravissime –je ne vais pas dire le contraire- et la douleur des proches de la victime est sans aucun doute extrême, comme le choc subi par certains. Dans ce contexte il m’est apparu essentiel de rationnaliser quelque peu le débat animé par les passions.
L’auteur des coups mortels a été identifié il y a 15 ans, il a, en principe, bénéficié d’un procès équitable. Il a été condamné. Il a purgé sa peine vis-à-vis de la société et il a été libéré. Mais l’affaire ne s’arrête pas là car l’homme émarge au spectacle, à la lumière, noire parfois, et au sensationnalisme.
Il a un discours et des justifications parfois décousues et incohérentes. Tout ce qu’il dit et fait se retourne contre lui, à tort ou à raison.
En Suisse, et au-delà de la peine qu’un condamné doit subir en vertu de sa condamnation prononcée par un tribunal, le législateur, poussé par un irrépressible besoin de protection ou de sanction généralisée, a développé tout un arsenal répressif accessoire. Un accessoire qui parfois devient le principal.
- Que l’on pense à la publication du jugement dans la presse (article 68 du Code pénal) -comme si le battage médiatique d’une affaire ne suffisait pas–
- Que l’on aborde l’interdiction d’exercer une activité, d’avoir un contact ou l’interdiction géographique (article 67 du Code pénal)
- Ou encore s’agissant de l’information donnée à la victime sur l’état de l’exécution d’une peine, ses modalités et sa fin (article 92a du Code pénal),
Tout concours à pourchasser le condamné, à l’épier, à le surveiller, et à le poursuivre au plus profond de son cachot; et l’on ne parle pas des excès de la vox populi. Le droit à l’oubli contre la vengeance perpétuelle.
Les dérapages issus de l’émotion, qui est toujours présente, nonobstant cet arsenal bien ficelé, destiné à protéger et à rassurer les victimes –à juste titre– est éminemment navrant.
Pourquoi alors ne pas condamner Bertrand Cantat à ne plus parler, ni chanter, lui interdire de se produire, de se déplacer, de vivre même…
Cette peine de mort médiatique et philosophique dont l’origine est purement émotionnelle, est indigne du droit, de la justice, des principes d’équité et de repentance.
Mais les jeux du cirque sont tellement tentants…
Visibles sur tous les supports médiatiques envisageables, générateurs de tant de profits et permettant aussi à une ribambelle de bien-pensants d’éructer leur mélodie fielleuse.
Alors Bertrand Cantat doit-il chanter ? Se taire ? S’expliquer ? Prier ? Disparaître ? Ou se réfugier dans un sombre cachot ? Un cachot qu’au Moyen-âge on appelait « les oubliettes »… ne l’oubliez pas !
Le Moyen-âge n’a, semble-t-il, jamais été aussi proche et la Renaissance n’est peut-être pas pour demain.
Véronique Fontana
Etude Fontana
Avocat Lausanne
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