La justice chevaleresque
Le blog de Véronique Fontana

Bruit du trafic : stop ou encore ?

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Notre Quotidien préféré s’est récemment fait l’écho d’une campagne de prévention contre le bruit, initiée par la Municipalité de Lausanne. En effet, il semble que différentes personnes, mais pas uniquement les Lausannois, se plaignent systématiquement du bruit lié au trafic routier. Cela étant, sans entrer dans des débats techniques sur la nature, la typologie et l’intensité des bruits routiers ou autoroutiers, qui peuvent prendre plusieurs formes, il est évident que les nuisances sonores sont de nature à perturber l’organisme humain, et peuvent induire des problèmes de sommeil, de stress, voire d’autres maladies à risque. C’est dans ce contexte que la Ville de Lausanne a décidé de mettre en place un dispositif spécial appelé « Radar pédagogique du bruit », qui a pour objectif de sensibiliser les automobilistes aux bruits provoqués par l’utilisation de leurs véhicules.

Cela étant, sur le plan juridique, se pose la question du respect par chaque automobiliste des exigences liées à la circulation routière. En particulier, l’article 29 LCR (Loi sur la Circulation routière) impose à chaque conducteur d’utiliser un véhicule en parfait état de fonctionnement et répondant aux prescriptions légales. L’articles 42 LCR réprime différentes incommodités, puisque le conducteur doit veiller à ne pas incommoder les usagers de la route et les riverains, notamment en provoquant du bruit, de la poussière, de la fumée ou des odeurs qu’il pourrait éviter. Par exemple, un défaut du pot d’échappement pourra tomber sous le coup des articles 29 et 42 alinéa 1er LCR, mais pour réprimer alors l’excès de bruit y relatif, la police sera obligée de pratiquer un examen de bruit à l’aide d’un sonomètre spécialisé. Par contre, la preuve d’un excès de bruit réprimé par l’article 42 alinéa 1er LCR ne requiert aucune exigence d’une expertise ou de la preuve de l’excès de bruit, d’autres moyens de preuves (rapport de police et constat de la police le cas échéant) pouvant suffire.

Par contre, en ce qui concerne les bruits provoqués par le conducteur, le cas échéant ses passagers ou d’autres personnes, l’article 33 OCR (Ordonnance sur la circulation routière) définit clairement une liste des bruits prohibés; liste qui n’est pas exhaustive. Ces comportements sont prohibés dans les quartiers habités, près des lieux de repos, et pendant la nuit. Il s’agit de :

 

  1. Faire fonctionner longtemps le démarreur, faire tourner et chauffer inutilement le moteur d’un véhicule à l’arrêt. Si pour se chauffer pendant l’hiver, un automobiliste reste quelques minutes en faisant tourner son moteur, il sera cependant condamné sur la base de l’article 34 alinéa 2 OCR. Ici, ce n’est pas le bruit qui sera le problème, mais la pollution par les gaz d’échappement. Cela est valable sur une place de parc ou aux abords d’une route.
  2. Faire tourner à vide le moteur à un régime élevé ou circuler à un régime élevé en petite vitesse.
  3. Accélérer trop rapidement, notamment au démarrage. On relèvera ici en particulier que le crissement de pneus au démarrage ou à un autre moment est susceptible d’être réprimé.
  4. Effectuer dans une localité des vas-et-viens ou des circuits inutiles. Ici, par exemple, un dépassement effectué de nuit par un scooter, ce qui provoque du bruit, a été considéré comme une violation de la LCR. Ici, il n’est même pas besoin de générer du bruit, le seul va-et-vient dans une rue, pour des motifs aberrants, est sanctionnable.
  5. Circuler trop rapidement, notamment avec des véhicules à bandages métalliques, avec des charges non arrimées, ou avec des remorques, dans les virages et dans les montées.
  6. Charger ou décharger sans précaution des véhicules, ainsi que transporter des bidons et autres charges bruyantes sans les arrimer ou les isoler les unes des autres.
  7. Claquer des portières, le capot du moteur, le couvercle du coffre, etc.
  8. Incommoder le voisinage en faisant fonctionner les appareils de radio et d’autres appareils restituant le son, installés ou transportés dans la voiture. Je relève en outre ici qu’avertir en guise d’appel est interdit, de même que tous les signaux inutiles et excessifs (article 40 LCR).

*   *   *

La liste à la Prévert que l’on vient de citer est exemplative de la volonté du législateur de limiter, d’aseptiser et de conditionner la conduite de véhicules automobiles, que ce soit en ville ou à l’extérieur des localités. Certes, le bruit inutile doit être limité, mais un grand nombre de véhicules, pourtant dûment homologués, émettent un bruit considérable, même à l’arrêt pour certains.

Intégrer dans les localités des zones 30 devrait-il alors s’accompagner de restrictions aux véhicules automobiles bruyants, pour n’admettre plus que les véhicules électriques ou hybrides qui, pour certains, font tellement peu de bruit qu’on ne les entend même pas, avec un autre risque d’accident ?

Faut-il toujours se taire ou crier sa détresse dans les localités, ou sur route, à plus grande vitesse ?

…Ou faut-il plutôt en appeler à la responsabilité individuelle de chacun, mais aussi de l’Etat, qui doit anticiper les comportements, mais doit aussi être cohérent dans son approche de la dialectique complexe entre individus et véhicules automobiles ?

…Mais là on dépasse la limite du droit pour entrer sur le terrain de la sociologie ou de la psychologie; terrain propice au plus grand silence.

Je vous chuchote à l’oreille mes remerciements pour votre attention.

Véronique Fontana

Etude Fontana
Cabinet avocats Lausanne

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