La justice chevaleresque
Le blog de Véronique Fontana

Stationnement sur les trottoirs à Genève: le Tribunal fédéral tire le frein.

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Dans un arrêt très récent, le Tribunal fédéral a admis un recours du Ministère public genevois, à l’encontre d’une décision de la Chambre pénale d’appel genevoise, qui avait acquitté un motocycliste ayant parqué son véhicule sur un trottoir, tout en laissant 1m50 de passage pour les piétons.

L’affaire pourrait être cocace si elle ne mettait pas en jeu la crédibilité de l’Etat. En effet, l’autorité cantonale supérieure genevoise n’avait pas condamné le motocycliste, en raison du fait que l’organe chargé de percevoir les amendes d’ordre en ville de Genève, renonçait à réprimer le stationnement des motocycles sur les trottoirs, si un passage d’au moins 1m50 était laissé aux piétons. Cette tolérance avait même été décidée par la Direction Générale de la Mobilité du canton de Genève. Une directive avait aussi été édictée dans ce sens et plusieurs autorités, sauf le Ministère public bien sûr, ne s’y étaient pas opposés.

Le Tribunal fédéral a donné tort aux autorités genevoises. Dans son analyse, il a examiné deux principes : le principe de l’erreur de droit  (prévu à l’article 21 du Code pénal),  tout en niant en l’espèce que les conditions en soient réunies, et le principe de la force dérogatoire du droit fédéral (art 49 Constitution) appliqué ici aux articles 91 alinéa 1 et 37 de la Loi sur la circulation routière, qui prévoit que les véhicules ne sont ni arrêtés ni parqués aux endroits où ils pourraient gêner ou mettre en danger la circulation.  Le Tribunal fédéral a rappelé que les cantons, et même le canton de Genève, n’étaient pas habilités à légiférer dans les matières réglées exhaustivement par le droit fédéral.

En conséquence, le motocycliste, d’ailleurs avocat de profession, ne pouvait partir du principe que son comportement était rendu licite, fondé sur une simple pratique, une tolérance, voire des directives internes à l’administration.

Indépendamment du résultat pratique de cette affaire, de la question de l’opportunité du Ministère public à vouloir sanctionner une pratique potentiellement utile au désengorgement automobile genevois, aux querelles incessantes en matière de mobilité dans le canton de Genève, aux récurrentes « genferei », se pose une question essentielle, à savoir le respect ou non du principe de la bonne foi et de la portée des garanties et directives de l’Etat. Curieusement, le Tribunal fédéral n’en parle pas.

Or ces principes sont essentiels dans la relation entre l’administré et l’Etat et sont peut-être même plus importants que ceux régissant la Loi sur la circulation routière !

La Confédération veut-elle vraiment, sur le terrain de la mobilité, rappeler à l’ordre nos amis du bout du lac ?

Il est, en effet, navrant de devoir constater, que des questions aussi essentielles que la mobilité des deux roues dans une mégalopole, soient tranchées par les tribunaux, même si cela émane de la plus haute instance de notre pays.

Alors, chers amis genevois, réfléchissez vivement à changer vos motos et autres scooters contre des vélos !

Et peut-être que la prochaine fois le Ministère public genevois s’en prendra aux vélos électriques?

Vive la mobilité en ville de Genève et bonjour aux embouteillages !

 

 

 

Véronique Fontana 

Etude Fontana

Commentaires

3 réponses à “Stationnement sur les trottoirs à Genève: le Tribunal fédéral tire le frein.”

  1. JEAN PAVIOT dit :

    sauf que Mme Fontana néglige les piétons : une distance de 1m5 pour ceux-ci ? Que se passe-t-il lorsque le trottoir ne fait pas 1m5 de large ou qu’une maman avec sa poussette et/ou plusieurs piétons se trouvent ensemble à devoir slalomer entre les vélos ? Enfin, pour 1 vélo bien parqué, combien sont rangés n’importe comment ? Les cyclistes sont-ils plus civiques que les automobilistes? A propos de piétons, et si nous marchions, tout simplement?!!! Mme Fontana dit de Genève qu’elle est une « magalopole » : allons, allons ! On fait le tour du centre à pied en combien de temps, Madame?

  2. Olivier Wilhem dit :

    Votre poste illustre bien la complexité rocambolesque du « 3ème pouvoir ».
    Chambre pénale…d’appel, Ministère public, TF, bref il faut être riche pour aller en justice!

    En cette période de remise en question des frais et autres dépenses des politiques, a-t-on idée de ce que tout celà coûte au contribuable? (rétro)pédalage ou pas?

    En d’autres termes, la justice se remet-elle en question et y a-t-il des processus de simplification et de modernisation avec les blockchains, par exemple?

    On sait que le fédéralisme a toujours bon dos, face aux susceptibilités et intérêts cantonaux, mais …les temps changent, dans un monde global où la vitesse est un impératif.

  3. Merlin dit :

    Les scooters ne se contentent pas simplement de parquer sur les trottoirs, ils roulent aussi dessus, et bien souvent sans égard pour les piétons, au prétexte qu’ils y auraient droit. Moi je ne marche, ni ne stationne sur leurs routes. P.s. Genève n’est pas une mégalopole..

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